22/9/25

Votre voisin construit sciemment sur votre propriété. La Cour constitutionnelle apporte un soulagement, même lorsque vous n’avez pas (encore) subi ou à craindre un préjudice direct.

Que faire si votre voisin entreprend soudain des travaux et — pire encore — place une partie d’un mur, d’une fondation ou d’une isolation sur votre terrain ? Le législateur belge estime que, même en cas de mauvaise foi, le juge ne peut pas toujours ordonner une démolition obligatoire.

La Cour constitutionnelle a nuancé cette interprétation dans un arrêt du 25 avril 2024. Cet article analyse cette jurisprudence et clarifie vos options lorsque qu’une partie de votre propriété est occupée.

La propriété est un droit fondamental, confirmé par la Constitution et par les traités internationaux. Le principe de base est simple : la limite parcellaire doit être respectée. Toutefois, le droit de propriété connaît des limites. Non seulement il existe des règles d’urbanisme, mais il existe également une correction générale : l’abus de droit. Cela signifie que chacun doit exercer ses droits comme le ferait une « personne raisonnable ».

Ainsi, même si vous avez le droit de construire un mur sur votre terrain, il peut être contraire à l’interdiction d’abus de droit d’ériger un mur de 20 mètres de haut qui prive tous vos voisins de la vue. En effet, aucune personne raisonnable n’exercerait son droit de propriété de cette manière.

Lorsqu’un problème juridique peut recevoir plusieurs solutions, il faut choisir celle qui cause le moins de dommages. L’interdiction d’abus de droit s’oppose donc au choix de l’option qui cause le plus de préjudice à la partie adverse.

Dépassement de limite de bonne foi

L’interdiction d’abus de droit joue un rôle important dans le sujet principal de cet article : que se passe-t-il lorsqu’un voisin viole votre droit de propriété en exécutant des travaux sur votre terrain ? Votre voisin a pu être mal informé et penser que la limite se situait ailleurs ; les plans pouvaient contenir une erreur ; ou il peut s’agir d’une erreur de mesure. Dans ces cas, le voisin ignorait que la limite avait été franchie et agissait de bonne foi.

Si le voisin est de bonne foi, le juge de paix recherchera une solution proportionnée. Il examinera la gravité de l’occupation, les dommages qu’une démolition entraînerait et si le dépassement pouvait être évité. Si le dépassement est très limité et que le voisin était de bonne foi, l’interdiction d’abus de droit s’oppose à une démolition forcée. Celle-ci causerait en effet des dommages disproportionnés. Bien entendu, cela n’exclut pas d’autres formes de réparation (par exemple une indemnisation).

Dépassement de limite de mauvaise foi

Qu’en est-il lorsque votre voisin savait que la limite parcellaire était franchie, par exemple parce que vous l’aviez averti ? Le Code civil dispose ce qui suit (article 3.62) :

Si le dépassement de limite est de mauvaise foi, le voisin peut exiger l’enlèvement de l’élément inhérent qui dépasse, sauf s’il n’y a ni occupation importante ni dommage potentiel pour ce dernier. S’il n’exige pas l’enlèvement, le second alinéa s’applique.

En d’autres termes, en cas de dépassement de mauvaise foi, l’enlèvement peut être exigé, sauf s’il n’y a ni occupation importante ni dommage potentiel. Dans ce cas, la construction de votre voisin reste en place, du moins selon le législateur.

La Cour constitutionnelle a toutefois mis un frein à cela. Elle a jugé que ce régime constituait une atteinte inacceptable au droit de propriété. Plus précisément, selon la Cour constitutionnelle, en cas de demande de démolition dans un délai raisonnable, l’enlèvement peut être imposé dans tous les cas, quel que soit le caractère limité du préjudice subi par le voisin.

Pratique

Si vous êtes confronté à un dépassement de limite, vous pouvez immédiatement entreprendre certaines démarches. Informez par écrit votre voisin du dépassement et rassemblez les pièces nécessaires (photos, plans, relevés). Si la situation perdure, le juge de paix peut imposer des mesures provisoires ou ordonner l’enlèvement.

Conclusion

Malgré l’arrêt de la Cour constitutionnelle, ces questions restent un exercice d’équilibre où une argumentation juridique experte demeure cruciale.

Vous souhaitez savoir si, dans votre dossier, la démolition ou l’enlèvement est défendable ou comment aborder au mieux une telle situation afin de ne pas perdre ce droit à l’enlèvement ? Vanbelle Law Boutique est prêt à défendre vos intérêts et analyser la situation. 

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