Vous gérez des biens immobiliers en transition ? Vous cherchez une alternative flexible au bail classique ? Vous vous interrogez sur la validité juridique de certaines conventions d'occupation temporaire ?
La proposition de loi du 20 février 2025, dont l’entrée en vigueur est logiquement prévue entre septembre 2025 et janvier 2026, pourrait bien révolutionner votre approche de l'occupation immobilière temporaire.

Longtemps cantonnée au statut de "contrat innommé" aux contours flous, l'occupation précaire va enfin bénéficier d'une reconnaissance légale. Cette codification apporte des clarifications attendues, mais soulève aussi de nouvelles questions fiscales et pratiques.
Découvrons ensemble les enjeux de cette nouveauté et ses principales implications concrètes.
Reconnaissance légale de l’occupation précaire
L'article 7.3.1, alinéa 2 du futur livre 7 du Code civil dispose ce qui suit :
"N'est pas un bail, un contrat par lequel une partie s'engage à fournir à l'autre partie l'usage et la jouissance précaire d'un bien moyennant un prix, pour autant que ce caractère précaire soit justifié par des motifs légitimes."
Cette disposition met fin à une longue période d'incertitude juridique. L'occupation précaire ne sera plus un contrat innommé évoluant au gré des interprétations jurisprudentielles, mais bel et bien une figure juridique autonome, distincte du bail.
Les motifs légitimes : la condition sine qua non de ce régime distinct
La jurisprudence et la doctrine ont progressivement délimité les contours des "motifs légitimes", en donnant notamment les exemples suivants :
- les périodes transitoires entre deux baux,
- l'attente de travaux de rénovation, la recherche d'un nouvel emplacement commercial,
- l'écoulement de stock avant déménagement,
- l’occupation préalable entre le compromis de vente et l’acte authentique,
- le test de viabilité commerciale,
A titre général, les motifs légitimes visent toute occupation disposant d’un caractère objectivement provisoire, souvent destinée à résoudre une situation temporaire.
Malgré cette codification, les tribunaux resteront certainement vigilants face aux tentatives de contournement des règles protectrices du bail. L'occupation précaire ne doit en effet pas servir à éluder les droits du locataire.
Quid des règles de sécurité et salubrité ?
L'article 4 du Code bruxellois du logement impose des exigences strictes de sécurité, salubrité et équipement.
Toutefois, l'article 5, alinéa 2 prévoit une exception importante : Sont exclus de ces obligations les hébergements touristiques (Ordonnance du 8 mai 2014), les occupations temporaires à finalité sociale et surtout les conventions d'occupation entre vendeur et acquéreur dans le cadre de l'aliénation d'un logement.
Cette dernière exception est particulièrement intéressante pour les transactions immobilières où, par exemple, le vendeur a besoin de temps pour trouver un nouveau logement.
Pour la Wallonie et la Flandre, il n’existe toutefois pas d'exceptions similaires spécifiquement prévues pour l'occupation précaire, ce qui implique que ces conventions devront généralement respecter les critères de salubrité applicables, sauf éventuellement à démontrer leur caractère temporaire et exceptionnel.
Quel est le traitement fiscal des revenus tirés de l’occupation précaire ?
À l'impôt des personnes physiques (IPP)
Les revenus d'une occupation précaire constituent-ils des "biens immobiliers donnés en location" au sens de l'article 7, §1, 2° du Code des impôts sur les revenus ?
La réponse est négative : Cette locution vise spécifiquement le bail au sens du Code civil. La Cour d'appel de Bruxelles l'a confirmé dans son arrêt du 6 juin 2024 (2017/AF/118).
En conséquence, c’est l'article 7, §1, 1° qui est d’application, ce qui signifie que la taxation s’opère sur le revenu cadastral uniquement, plus le précompte immobilier.
Il en résulte un avantage fiscal significatif en comparaison avec les baux non résidentiels traditionnels car on évite de ce fait la taxation sur les revenus réels !
En matière de TVA
L'occupation précaire reste dans le champ de la TVA mais exemptée sans droit à déduction.
En matière de droits d'enregistrement
Dans l’ancien régime, il existait une incertitude sur l'application du droit proportionnel de 0,2%.
Dorénavant, l'acte d'occupation précaire ne sera enregistrable qu'au droit fixe de 50 EUR, ce qui peut présenter une économie substantielle pour les biens de valeur élevée.

Comment rédiger une convention d'occupation précaire ?
La convention d’occupation précaire doit être rédigée avec soin afin de ne pas être requalifiée en bail classique.
Il est essentiel de commencer par une clause de qualification claire, précisant que « les parties conviennent expressément que la présente convention constitue une occupation précaire au sens de l'article 7.3.1, alinéa 2 du Code civil, et non un bail ».
Il faut ensuite détailler les motifs légitimes qui justifient le caractère temporaire de l’occupation : il peut s’agir, par exemple, de travaux à venir, d’un projet immobilier en cours, ou d’un usage transitoire lié à une situation particulière. La durée de l’occupation doit rester cohérente avec cet objectif. Une durée trop longue ou reconductible risquerait de faire tomber la convention sous le régime du bail.
Le contrat doit également prévoir les conditions de préavis et de résiliation : délai raisonnable (conformément à l’article 5.75 du Code civil), motifs de résiliation anticipée, et état des lieux de sortie. Il convient également de définir les obligations des parties : entretien, répartition des charges et impôts, assurances, respect des règles de sécurité.
Il faut veiller à éviter certaines erreurs fréquentes, telles que l’absence de justification sérieuse de la précarité, l’insertion de clauses de reconduction automatique ou encore l’octroi de droits équivalents à ceux d’un locataire.
Il est enfin recommandé de bien documenter le contexte de précarité, de limiter la durée de manière réaliste, d’organiser un état des lieux précis et d’informer les parties sur les éventuelles implications fiscales.

Nouvelles opportunités selon votre profil professionnel
Pour les propriétaires bailleurs
Cette réforme offre une solution fiscalement avantageuse pour les périodes transitoires, une flexibilité accrue dans la gestion du patrimoine immobilier et une réduction des contraintes réglementaires. Toutefois, il convient de documenter soigneusement les motifs légitimes, d'éviter la répétition systématique (risque de requalification) et d'adapter la durée à la situation objective.
Pour les investisseurs et promoteurs
Les applications pratiques sont nombreuses : occupation temporaire pendant les travaux, valorisation de biens en attente de vente, solutions transitoires pour les locataires en place et gestion optimisée des périodes de commercialisation.
Pour les gestionnaires immobiliers
Cette évolution légale ouvre de nouvelles possibilités : outil de gestion des vacances locatives, alternative aux baux à court terme traditionnels, optimisation fiscale pour les propriétaires et flexibilité renforcée dans les négociations.
Conclusion
Cette réforme du droit immobilier peut nécessiter une adaptation rapide et précise de vos pratiques. Entre opportunités fiscales, nouveaux risques juridiques et évolutions contractuelles, chaque détail compte pour optimiser vos opérations.

Riche de ses dizaines d’années d’expérience, Vanbelle Law Boutique vous accompagne dans le cadre de ce nouveau régime ainsi que dans toutes vos problématiques de droit immobilier : baux, ventes, promotions immobilières, copropriétés, urbanisme, fiscalité, etc. Parce qu'anticiper les évolutions légales, c'est éviter les litiges et prendre une longueur d'avance sur tout le monde.